MANIFESTO
TOWARD A NEW SPACE: THE PERSPECTIVE OF THE ABSTRACT
Stelio SCAMANGA, 1964
Five hundred years have passed, and western painting is still a prisoner
of the concept of the middle ground, of Albertian perspective.
This stable and symmetrical space, defined by a system of mathematical calculation, composed of discontinuous elements, clearly analyzed, where the surprise of metamorphoses is banished, illustrates a Cartesian way of thinking based on development and the concrete world.
The work is conceived as an object in the universe, illuminated like other objects by the light of day.
The concept of the middle ground that favors the dispersion of volume; the play of empty spaces, holes, multiple planes colliding that break up the light, the reliefs and protrusions, based on modeling and shading.
This space, which adopts the notion of a ground, derives from a rationalization of the thought that man would rebel against a separate domain. A domain viewed by man.
Then the image of the painting is treated only as a retinal image, combining an illusion of three dimensions on one plane.
This is true for painting called figurative as well as for painting called abstract. A false definition, this abstract painting.
Western painting has never been abstract; it is rather an abstraction of the image seen by the eye always subject to the laws of the middle ground.
The perspective of the abstract is based on the concept of the limit-space.
A space that rejects the system of the mathematical series in order to adopt the system of the labyrinth, which proceeds by mobile syntheses and where the eye travels without finding its way, intentionally led astray by a linear caprice that slips away to reach a secret goal.
A sort of grid is formed, creating an infinite variety of blocks of space that constitute a fragmented universe.
The shapes tend to be wed to their respective curves, to meet, become entangled; they go from the evenness of the curves and contacts to this undulating continuity, where the relationship of the parts ceases to be discernible, where the beginning and the end are concealed. It is a space where the light is in the painting.
The work is conceived as a universe that has its own light, its inner light.
A new dimension is formed, which is neither movement nor depth.
This space rejects the mathematical series in favor of interlacing. It is a mobile space:
The metamorphoses occur there not in separate stages but in the complex continuity of curves, interlaced spires, in the flexion of a curve, creating rhythm and combination, and implying a whole future of alternations, duplications, and folds. The space of interlacing is not flat:
The strips that make up these unstable figures pass under one another, and their obvious shape on the plane of the image is explained only by a secret activity on a plane underneath.
This is the perspective of the abstract. It does not reside entirely in the play of the interlacing.
Combinations of irregular polyhedrons, alternating light and dark, without the slightest use of shadow, give us the illusion—at once insistent and elusive—of a shimmering relief.
The compartments never juxtapose two equal values, but interpose a different value: this is the rule of the structure of this space.
No notion of a ground; it is a space seen beyond man, a periphery that extends and surrounds at the same time. The creation of a world that is not our own.
The power of abstraction and the infinite resources of the imaginary.
An illustration of a way of thinking that rejects development to adopt involution, that rejects the concrete world in favor of the vagaries of the dream. A space that translates the human reverie on form.
Stelio Scamanga - December 1964
VERSION FRANÇAISE
"Cinq cents ans ont passé et la peinture occidentale est toujours prisonnière du concept de l’espace milieu, de la perspective albertienne. Cet espace stable et symétrique, défini par le système de la série, composé d’éléments discontinus, nettement analysés, où le contenu des métamorphoses est banni, illustre une pensée cartésienne basée sur le développement et le monde concret".
«L’œuvre est conçue comme un objet dans l’univers, éclairé comme les autres objets par la lumière du jour. «Concept de l’espace-milieu qui favorise la dispersion des volumes : le jeu des vides, les trouées, les plans multiples heurtés qui brisent la lumière, les reliefs et les saillies, se basant sur le modelé et l’ombre. «Cet espace, qui adopte la notion de fond, dérive d’une rationalisation de la pensée qui veut que l’homme se meuve contre un domaine séparé.
Un domaine vu par l’homme. «Dès lors, l’image du tableau n’est traitée que comme l’image rétinienne en combinant sur un plan une illusion des trois dimensions. «Ceci est vrai pour la peinture dite “figurative” aussi bien que pour la peinture dite “abstraite”. Fausse définition que cette peinture abstraite. «La peinture occidentale n’a jamais été abstraite ; c’est plutôt une abstraction de l’image vue par l’œil soumise toujours aux lois de l’espace-milieu.
«La perspective de l’abstrait se base sur le concept de l’espace-limite. «Espace qui renonce au système de la série pour adopter le système du labyrinthe qui procède par synthèses mobiles et où la vue chemine sans se reconnaître, intentionnellement égarée par un caprice linéaire qui se dérobe pour rejoindre un but secret. «Une espèce de grille se forme et crée une variété infinie de blocs d’espaces qui constituent un univers morcelé. «Les formes tendent à épouser leurs courbes respectives, à se rejoindre, à se mêler ; de la régularité des courbes et des contacts, elles passent à cette continuité ondulante où le rapport des parties cesse d’être discernable, où le commencement et la fin sont cachés.
C’est un espace où la lumière est dans la peinture. «L’œuvre est conçue comme un univers ayant sa lumière propre, sa lumière intérieure. «Une dimension nouvelle s’élabore qui n’est ni le mouvement ni la profondeur. «Cet espace renonce à la série pour l’entrelac. C’est un espace mobile. «Les métamorphoses s’y font non par stades séparés mais dans la continuité complexe des courbes, des spires enlacées, dans la flexion d’une courbe, créant rythme et combinaison, et implique tout un avenir d’alternances, de dédoublements et de replis. L’espace de l’entrelac n’est pas plat. «Les rubans dont sont faites ces figures instables passent les uns sous les autres et leur forme évidente sur le plan de l’image ne s’explique que par une activité secrète sur un plan au-dessous.
«C’est la perspective de l’abstrait. «Elle ne réside pas tout entière dans des jeux d’entrelacs. «Des combinaisons de polyèdres irréguliers alternés de clair et de sombre, sans faire le moindre usage des ombres, nous donnent l’illusion, à la fois obsédante et fugitive, d’un châtoyant relief. «Les compartiments ne juxtaposent jamais deux valeurs égales, mais interposent une valeur différente : c’est la règle de structure de cet espace. «Aucune notion de fond : c’est un espace qui est vu au-delà de l’homme, une périphérie qui le prolonge et l’investit à la fois.
Création d’un monde qui n’est pas le nôtre. «Puissance de l’abstraction et infinies ressources de l’imaginaire. «Illustration d’une pensée qui renonce au développement pour adopter l’involution au monde concret pour les caprices du songe. Espace qui traduit la rêverie humaine sur la forme».
Stélio Scamanga - Décembre1964